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Exploitation d’une base de données polliniques pour identifier des variations climatiques

La construction de plusieurs diagrammes polliniques, issus de différentes régions du globe, permet de généraliser à une échelle planétaire les indices paléo-écologiques du changement climatique survenu il y a environ 11 000 ans.

Auteur : Vincent GUILI, Lycée Descartes, Saint-Genis-Laval

Liens avec le BO

Programme de sciences de la vie et de la Terre de terminale spécialité
BO spécial n°8 du 25 juillet 2019
Terminale spécialité : Enjeux planétaires contemporains
Les climats de la Terre : comprendre le passé pour agir aujourd’hui et demain
Reconstituer et comprendre les variations climatiques passées

Connaissances

À l’échelle du Quaternaire, des données paléo-écologiques attestent l’existence, sur la période s’étendant entre-120 000 et -11 000 ans, d’une glaciation, c’est-à- dire d’une période de temps où la baisse planétaire des températures conduit à une vaste extension des calottes glaciaires.

Capacités, attitudes

Rassembler et confronter une diversité d’indices sur le dernier maximum glaciaire et sur le réchauffement de l’Holocène (changement de la mégafaune dans les peintures rupestres, cartographie des fronts morainiques, construction et utilisation de diagrammes polliniques, terrasses, paléoniveaux marins…).


 

Mise en situation

Les plantes à fleurs se reproduisent en disséminant notamment des grains de pollens. Chaque espèce produit des grains caractéristiques, qu’on peut identifier selon leur taille, leur forme, l’ornementation (simple ou complexe) de leur enveloppe ainsi que sur la présence, le nombre et la disposition de pores ou de sillons à leur surface. L’essentiel de la pluie pollinique retombant au sol est constituée de pollens de provenance locale mais aussi régionale. À l’abri de l’air, dans un milieu acide et humide (tourbière, marécage, lac…), le pollen peut se fossiliser et se conserver des centaines de milliers d’années. Pour une période donnée, la combinaison des pollens retrouvés donne une idée de la végétation qui occupait le lieu étudié et donc des conditions climatiques qui prévalaient.


Document 1 : Types de plantes et climat
Trois exemples de biomes et leurs végétations dominantes. Actuellement ces biomes se succèdent dans l’espace du nord vers le sud : des zones boréales (autour de l’océan arctique pour la Toundra) jusqu’aux zones de moyennes latitudes (forêts tempérées). En un lieu donné, ces biomes ont pu se succéder dans le temps à l’occasion d’un réchauffement climatique.


 
De nombreux comptages de pollens ont été réalisés suite à des carottages en différents lieux. Plusieurs bases de données mondiales stockent les résultats de ces comptages.
Le site https://libmol.org/pollens, développé par Paul Pillot, rend accessible sur une interface simple les données de la Global Pollen Database et de l’European Pollen Database :


Document 2 : Base de données polliniques

Sur https://libmol.org/pollens les sites de prélèvement sont géolocalisés (repère coloré). En cliquant sur un repère, on accède au nom du site, à la période couverte (âge mini et âge maxi) et à un lien permettant de télécharger un fichier tableur contenant les données de comptage pollinique du carottage.
Les proportions des pollens de différentes espèces peuvent être représentées sur un graphique en fonction de la profondeur du carottage, et donc de l’âge : on obtient ainsi un diagramme pollinique.

Consigne

Les données d’identification et de comptage polliniques extraites d’un carottage en un point particulier du globe donnent des indices de la variation du climat à cet endroit. Mais un seul jeu de données en un point particulier ne permet pas de généraliser à l’ensemble de la planète.
À partir de données polliniques choisies dans la base de données, construire des diagrammes polliniques de différents endroits sur Terre pour argumenter un changement de climat à l’échelle mondiale il y a environ 11 000 ans.

L’objectif de cette activité est de faire comprendre aux élèves la nécessité de disposer d’un ensemble suffisant de résultats convergents pour pouvoir procéder à une généralisation. Comme la construction de multiples graphiques par un même élève peut être coûteuse en temps, il est envisageable de répartir le travail entre différents groupes au sein de la classe, puis de procéder à une mise en commun. Cette dernière option présente en outre l’avantage de mobiliser des compétences de communication et de collaboration.


 

Ressources

Les fichiers tableurs extraits de la base de données sont bruts : pour chaque profondeur et chaque âge, ils indiquent les quantités de grains de pollen identifiés. Le traitement des données par les élèves se heurte donc à plusieurs obstacles :

  • il y a plusieurs dizaines d’espèces présentes ;
  • les espèces sont désignées par leurs noms de genre, en latin ;
  • il s’agit de quantités absolues, et non de pourcentages.

Pour rendre possible la réalisation de diagrammes polliniques par les élèves, un prétraitement automatisé des données est proposé par l’intermédiaire d’une macro incluse dans un fichier tableur. À l’issue de l’exécution de la macro, les données se présentent ainsi :

  • seules les espèces emblématiques des biomes taïga/toundra/forêt tempérée sont conservées ;
  • les espèces sont désignées par leurs noms vernaculaires, en français ;
  • les valeurs sont ramenées à des quantités relatives, en pourcentages.

Les fichiers Pollen.xlsm ou Pollen.ods contiennent les macros.
Des fiches protocoles sont jointes pour guider leur utilisation : Protocole_diagramme_pollinique-Excel.pdf et Protocole_diagramme_pollinique-Calc.pdf.

Remarque concernant l’utilisation des macros : les logiciels doivent être au préalable paramétrés pour autoriser l’exécution des macros (il y a généralement un avertissement à l’ouverture du fichier). Pour la macro LibreOfficeCalc, une version récente (au moins 7) du logiciel est requise.


 

Résultats

Pour être exploitables, les diagrammes polliniques construits doivent respecter quelques critères à faire trouver ou comprendre aux élèves :

  • la période couverte doit être suffisamment longue, et en tous cas englober la période entre 9 000 et 12 000 ans BP ;
  • les sites choisis doivent se situer de préférence dans la zone actuellement tempérée pour permettre d’observer une transition de la taïga à la forêt tempérée.

Quelques ajustements des graphiques produits par défaut peuvent être réalisés pour gagner en lisibilité : ajustement des axes (inversion de l’axe des X pour mettre le présent à droite), changement des couleurs des courbes.

Les diagrammes polliniques réalisés à partir de différents carottages répartis sur l’ensemble de l’hémisphère nord montrent des variations cohérentes des cortèges végétaux aux alentours de 11 000 ans BP, avec le passage de biomes de type taïga à des biomes de type forêt (toundra ou forêt tempérée), indiquant ainsi une élévation de la température. On peut donc conclure à un réchauffement climatique global.
Ce résultat peut toutefois être nuancé, car la transition de végétation est plus ou moins tardive selon les endroits considérés, ce qui laisse supposer que la fin de la glaciation ne s’est pas déroulée de façon uniforme.
Par ailleurs, au cours des derniers milliers d’années, on observe parfois un recul des proportions de pollens d’arbres, ce qui peut s’interpréter par la déforestation et la mise en culture des sols par les humains.

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